Édité par le label Prime Matter de Koch Media (pardon, c’est Plaion désormais), The Chant est développé par le jeune studio canadien Brass Token qui signe là son  tout premier jeu. Une petite équipe d’une vingtaine de personnes composée notamment de vétérans ayant travaillé sur des productions vidéoludiques telles que Canis Canem Edit (Bully) ou Sleeping Dogs. Une bonne surprise ? 

Bienvenue dans la secte du gourou Skippy 

Encore dévorée par la mort de sa jeune sœur qui a eu lieu des années plus tôt, et lasse de son travail en biomédecine, Jess Briars, l'héroïne de The Chant, a besoin de lâcher prise. Ne sachant plus quoi faire pour remonter la pente et chasser les visions d’effroi dont elle est victime, celle-ci finit par accepter de rejoindre une vieille amie pour une paisible retraite spirituelle sur l’île de la Gloire. Accueillie par sa copine d’enfance, Jess devra se plier à une coutume locale lors de son week-end : s’habiller en blanc afin de « se focaliser sur une énergie unique ». Entre ça et le nom de l’endroit où elle a atterri, la jeune femme comprend rapidement qu’il y a quelque chose de louche et qu’elle met peut-être le pied dans une secte. Une intuition qui va rapidement s’avérer juste au moment de rencontrer les autres participants de ce colloque new-age, dont le gourou Tyler. Des personnes qui sont aussi là pour exorciser de vieux démons et s’élever spirituellement. Tout un programme qui fait penser à la récente série Nine Perfect Strangers d’Amazon Prime avec une Nicole Kidman habitée et angoissante. 

test The Chant

Les choses tournent très vite au vinaigre lors d’un rituel du thé sacré qui donne des hallucinations à Jess. Entre sa complice Kim qui vrille complètement et la vision d’une créature ressemblant au Démogorgon de Stranger Things, le trip est brutal. Est-ce que tout cela est vrai ? Existe-t-il un lien avec le flashback du début ? C’est ce que va essayer de comprendre notre héroïne tout en sauvant sa peau car la petite incantation semble avoir ouvert une porte sur un autre monde. L’histoire et le sujet traité font partie d’emblée des facteurs de réussite du titre. Brass Token a fait le choix d’un thème très peu courant et l’aborde grâce à une maîtrise encourageante pour un premier jeu. On est pris dans le récit jusqu’à la fin. L’ambiance joue également un grand rôle car même si ça ne fait absolument pas peur - c’est plus un thriller d’horreur psychologique -, il y a de bonnes scènes psychédéliques. Les peurs des différents personnages nourrissent les environnements et le récit. Ce qui est d’autant plus fort, c’est que l’idée principale de retraite spirituelle, secte, de science occulte se reflète parfaitement dans le gameplay. 

Les bonnes idées de The Chant

À son arrivée sur l’île, Jess reçoit un prisme de couleur. Un cristal pour traverser des poches dimensionnelles de l’Obscurité, qui ont pris possession de l’île et dans lesquelles vivent des créatures surnaturelles. En franchissant ces barrières énergétiques, le mental de notre experte en biomédecine sera mis à mal au point de faire une crise de panique. Dans cet état, impossible de combattre. Seule la fuite, pour redescendre en pression, est possible. Le mental comme la santé physique et la spiritualité sont les trois mécaniques essentielles du jeu. On a expliqué la première et la deuxième parle d’elle-même mais qu’en est-il de la spiritualité ? C’est une composante qui sert à regagner du mental en méditant et également à déclencher des compétences. Il faudra en permanence surveiller ces trois points et absorber certaines ressources amassées (lavande, gingembre, champignons hallucinogènes) pour remplir leur jauge respective. C’est de cela dont dépend la survie de Jess qui devra aussi se défendre dans certains cas où il n’y aucune échappatoire.

critique The Chant

Là encore, The Chant est très cohérent avec ce qu’il nous raconte. Durant notre périple, on croise tout un tas de créatures comme des hommes masqués à la peau arrachée, des plantes, de gros crapauds, etc. Un bestiaire plutôt cool qui sort un peu des sentiers battus du survival-horror. Pour en découdre avec elles, on a des armes artisanales à crafter comme le Fouet incandescent (des branches enflammées qui font des dégâts supplémentaires en dehors des zones de l’Obscurité), un bâton de sauge pour repousser les insectes ou de sorcière pour maximiser les dommages et recouvrer de la spiritualité (dans les passages de l’Obscurité). Mais également des objets tels que du sel, de l’huile essentielle ou du pétrole qui peuvent être lancés ou à l’inverse laissés au sol comme des pièges. Étourdissement, enracinement, ralentissement des ennemis, les propriétés diffèrent d’un item et d’un usage à l’autre. 

Perfectible à cause d’une esquive généreuse, des coups léger/fort dont on peine à faire la différence en termes de dommages ou d’absence de finesse, le système de combat retranscrit en revanche ce sentiment d’urgence d’un survival-horror, même si le titre est assez tourné vers l’action. Comme dit plus haut, Jessica a en plus des capacités qui dépendent des prismes de couleurs. La « Stase » peut par exemple ralentir les adversaires. Avec « Repousser » et son cri strident, les opposants seront projetés en arrière et blessés mortellement si l’aptitude est combinée avec d’autres attaques. 

Un petit goût d’ancien

Loin des mondes ouverts qui pullulent aujourd’hui, The Chant est un jeu d’action narratif qui tire vers le survival-horror. Sa structure linéaire faite d’allers-retours - avec des clés à trouver, à assembler, de nouvelles dimensions à explorer en rebroussant chemin et quelques énigmes à résoudre -, et le sentiment de vulnérabilité nous a évoqué les Resident Evil d’antan sans être une copie. Durant cette excursion new-age, Jessica engrange de l’expérience en fonction de toutes ses actions allant de la simple cueillette de ressources au choix de dialogues. Sans grand intérêt, ces discussions permettent de modifier quelque peu la fin de trois manières différentes. Cette XP gagnée contribuera à débloquer des emplacements de compétences qui devront être activés via des cristaux prismatiques. On pourra ainsi perfectionner son esquive, sa barre de vie et autres éléments directement en lien avec les mécaniques Mental, Santé et Spiritualité.

Verdict The Chant

Si le jeu est une bonne surprise en soi, tout n’est pas rose pour autant. Le mixage audio est assez approximatif avec des sons qui agressent sans raison, les animations avec l'héroïne sont bizarres et souvent trop brusques (ex : quand on ouvre une porte) et ça manque de séquences plus flippantes. Des erreurs de jeunesse qui n'effacent pas la bonne surprise et le reste.